Le gouverneur Richard Muyej monte au créneau et appelle à encadrer les jeunes des partis politiques. Kolwezi, la capitale du Lualaba sa province, a été le théâtre des violences symboliques le samedi 9 septembre 2019. Les jeunes du PPRD ont brûlé une effigie du président Tshisekedi. Une riposte à l’image de Joseph Kabila que des jeunes de l’UDPS ont arrachée dans la ville.
Richard Muyej se montre sévère. Son message circule dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, vraisemblablement par les services du gouverneur.
Arrêter les violences
« Il ne faut pas jouer avec le feu. Ils étaient jeunes, [les auteurs des violences de samedi], quand au début des années 90, sur base de l’incompréhension entre les communautés a explosé ici le choc des communautés. […] J’ai géré cette situation à travers la ville de Likasi, la ville de Kolwezi. Et dans une certaine mesure, dans certaines communes de la ville de Lubumbashi. Il faut que ça s’arrête, très vite », ordonne le gouverneur du Lualaba.
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Ce rappel historique, à lui seul, porte plus de charge émotionnelle et socio politique importante dans l’ancien Katanga. C’est carrément un sujet tabou pour plusieurs leaders politiques locaux. Il s’agit du conflit entre les Katangais et Kasaïens, Congolais originaires de la région du centre du pays.
Le conflit décennal entre Kasaïens et Katangais
Au plus fort de la crise politique entre le président Mobutu et l’opposition, représentée en ce début de la décennie de la démocratisation par l’opposant historique Etienne Tshisekedi. Et notamment par les Katangais Jean Nguz et Gabriel Kyungu.
Lorsque leur coalition, « l’Union sacrée » de l’opposition éclate, une manœuvre présidentielle pour l’affaiblir, les communautés de ces leaders s’affrontent. L’événement se passe dans le Katanga, alors appelé Shaba, d’où sont « refoulés » les Kasaïens. D’autres y perdront d’ailleurs leurs vies.
Beaucoup considèrent aujourd’hui qu’il y a risque de raviver ces tensions (pdf) pas encore définitivement résolues. Ni d’ailleurs par la justice. Même si depuis, les mêmes communautés vivent ensemble.
Le propos du gouverneur Muyej laisse alors sous-entendre que les jeunes de l’UDPS, seraient originaires du Kasaï.
Portrait de Kabila décroché, l’effigie de Tshisekedi brûlée
Ce sont ces jeunes, membres du parti du président Félix Tshisekedi, qui ont en premier arraché une effigie de l’ancien président Joseph Kabila. Ils effectuaient, à l’occasion, une marche de soutien à l’enseignement élémentaire gratuit décrété par le Président. En réaction, les jeunes du PPRD, le parti de l’ex président Joseph Kabila, ont décidé de se venger.
« On s’est attaqué aux symboles de notre parti, on s’est attaqué à notre leader [Joseph Kabila] à travers son portrait. On peut aller en justice. Mais on ne descend pas dans la rue pour faire la même chose, insiste Richard Muyej. Quand on fait la même chose, c’est qu’on se ressemble. Il faut éviter de faire la même chose ».
Sur quoi, il invite les dirigeants du PPRD et de l’UDPS à encadrer leurs membres. Avant de faire cette pique, à destination de l’UDPS. Le parti dont les militants ont effectué une marche à Kolwezi. Et à Lubumbashi d’ailleurs, le même samedi, sur la gratuité de l’enseignement. « On ne crée pas un parti politique juste pour des slogans et faire des marches qui n’ont pas de sens. On crée un parti politique en éduquant. Parce qu’on se prépare à prendre le pouvoir. Et quand les gens prennent le pouvoir, ils doivent connaître tous les termes politiques ».
Richard Muyej convoque les responsables politiques des protagonistes
Muyej s’amuse alors sur ce que veut dire « passation pacifique et civilisée » du pouvoir, et « coalition » entre les deux camps. « Il faut en connaître le contenu. On n’agit pas comme ça », dit-il, en mimant le hasard ou le vide. « Comme disent les Kinois : Ngulu ngulu », c’est-à-dire, dans le désordre à la manière du cochon (Ndlr).
Lundi, le gouverneur du Lualaba promet de parler aux responsables de deux partis pour leur parler. Il entend « leur dire des mots assez forts », pour qu’ils comprennent qu’il n’est pas là « pour gérer des disputes ». Situation, des disputes, dont il dit connaître les conséquences fâcheuses.
Didier Makal