L’intolérance envers l’opposition plombe la démocratie en RDC (Opinion)

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la démocratie en RDC

Le 20 mai, une marche de l’opposition a mal tourné à Kinshasa. Des hommes et des femmes ont fini les uns blessés, les autres aux arrêts. Derrière la dénonciation de la cherté de la vie au pays, les opposants tentent aussi de baliser le chemin vers les élections de décembre prochain. Le pouvoir l’ayant compris, s’organise pour leur barrer la route et tenter à son tour de s’attirer les grâces du peuple. Entre-temps, la démocratie en RDC prend des coups.

Ce 23 mai encore, l’opposition s’est heurtée aux crocs du pouvoir sur la route de Matadi. Après démolition du podium où l’opposant Moise Katumbi allait sûrement haranguer la foule, le pouvoir a déployé la police pour lui barrer la route à la sortie de Kinshasa. Une scène qui rappelle son blocage à Kasumbalesa sous Kabila, comme si l’histoire se réécrivait.

La démocratie en RDC fait marche arrière

Ces deux sorties de l’opposition et les barrières qu’elles ont rencontrées donnent à croire que la démocratie congolaise ne réussit pas encore à avancer depuis plus de 20 ans. Les durs souvenirs du passage de Mobutu à Kabila père ne sont pas bientôt oubliés. Et de Kabila fils à Tshisekedi, ce fut un passage sanglant. Des familles endeuillées, des opposants exilés ou emprisonnés, des mouvements citoyens intimidés, des voix muselées, des personnalités enlevées, etc.

Entre-temps, le pouvoir est passé à Félix Tshisekedi, fils d’une opposition de plus de 30 ans. En théorie, c’est l’homme qu’il fallait pour enraciner la démocratie en RDC. Lui qui, contrairement à Kabila, a rencontré la barbarie du pouvoir précédent avant d’y accéder lui aussi. Lui dont le père est mort militant pour la démocratie ne pouvait que se distinguer de ceux que lui-même traitait alors de bourreaux du peuple à l’époque. Mais hélas !

Lire aussi: Marche de l’opposition à Kinshasa : une répression de trop dans un pays blessé

Aujourd’hui, de même que Kabila qu’il a combattu, Tshisekedi ne semble plus tolérer l’opposition, sauf en théorie. Lui qui se montrait encore modéré affiche maintenant ses couleurs. Les marches de l’opposition vont désormais rencontrer la police et sa brutalité à la place de son encadrement qui est constitutionnel. Pourtant, en 2019 par exemple, Moïse Katumbi est rentré de l’exil et accueilli en dieu à Lubumbashi sans heurts. Dès le moment qu’il s’est clairement montré opposé au pouvoir, il a perdu son fauteuil blanc.

Ces faits, entre autres, démontrent à suffisance que la démocratie a pris encore des coups au pays de Lumumba. Les rêves du peuple s’enlisent et pour l’avenir, l’inquiétude est à nouveau là. Tous les arguments sont bons pour taire qui on veut. Et nous, journalistes, la peur nous hantent. Car si on traite ainsi le bois vert, pire est ce qui pourrait arriver au bois mort. C’est pourquoi certains s’attachent à des camps.

Des procédés illégaux contre des libertés légales

Constitutionnellement, la circultation sur le territoire national est un droit pour tous les Congolais, autant que la liberté de manifestation. Il est donc une violation d’empêcher un congolais de circuler au Congo. C’est d’ailleurs le regret de Kakula Bernard, cité par le magazine La Guardia sur son site d’information.

Ce coordonnateur de l’observatoire des libertés publiques dans la province du Haut-Katanga rappelle les principes de base. « Chaque citoyen, dit-il, doit être libre de se déplacer. L’empêcher d’aller dans une province, c’est une violation de ses droits et libertés consacrées. Moïse Katumbi a un parti politique légal et donc ses activités sont également autorisées.» Il contclut : « Il faut le laisser [Katumbi, ndlr] libre de circuler comme tout citoyen », ce qui implique de laisser émerger une vraie démocratie en RDC, comme tant on la chante.

Lire aussi: RDC-Elections : Les candidatures du Katanga peuvent-elles intimider Tshisekedi (Opinion)

C’est aussi l’esprit de l’article 30 de la constitution de la RDC. Il stipule que : « Toute personne qui se trouve sur le territoire national a le droit d’y circuler librement, d’y fixer sa résidence, de le quitter et d’y revenir, dans les conditions fixées par la loi. » Plus loin encore, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques dit autrement la même chose, à son article 12. « Quiconque se trouve légalement sur le territoire d’un Etat a le droit d’y circuler librement et d’y choisir librement sa résidence. (…) » Ce dernier texte est ratifié par la RDC depuis 1983.

Laisser l’opposition s’exprimer honnore le pouvoir en place

En toute liberté d’esprit, on peut affirmer que depuis Kabila, Moïse Katumbi intimide. Les faits le démontrent quoi nombreux tentent de minimiser le poids de l’opposition. Pourtant, les différents pouvoirs auraient plus à gagner en laissant fleurir les valeurs démocratiques notamment par la libre expression de la voix de l’opposition. En oppressant l’opposition on la pousse à l’extremisme dans ses actions. Cela se vit maintenant comme depuis toujours en RDC.

Regrettant, lui aussi, cette réduction du champ de la démocratie au pays, l’avocat Hubert Tshiswaka a commenté sur Twitter le traitement de Katumbi au Kongo Central. Pour lui, « le Ministre de l’intérieur devrait se saisir de cette flagrante violation du droit garanti à tout citoyen, et instruire la PNC à laisser Moïse Katumbi circuler librement. »

De ce qui précède, il se révèle que les autorités de la RDC violent le droit des opposants à circuler notamment lorsque la route a été barrée à Moïse Katumbi à l’entrée du Kongo Central. Au-delà des déviations associées aux opposants et qui ne sont pas négligeables, les interventions du pouvoir ne favorisent pas l’enracinement de la démocratie en RDC.

Par Fidèle Bwirhonde

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