En l’espace d’un mois, la RDC a atteint le record des évasions des prisons. Six au total, spectaculaires, les unes comme les autres. Que faut-il craindre ?
Se sauver des prisons, presqu’un réflexe de protection
Les conditions carcérales, presqu’insupportables en RDC, font penser souvent à s’évader. A la première occasion offerte, c’est presque l’attitude normale que de tenter de se sauver. Quitte à tomber entre les mains des services de sécurité. C’est ce que pense, en tout cas, le criminologue et professeur de l’Université de Lubumbashi, Norbert Lupitshi.
« Un effort doit encore être fourni par ceux qui gèrent les prisons pour rendre ce milieu (prison) vivable. Ailleurs, le prisonnier n’a rien à envier à l’homme libre, à part la liberté. Chez-nous, ce sont les conditions de vie qui posent problème. » Le surnombre, les infrastructures, la réponse aux besoins fondamentaux, … rendent la prison congolaise insupportable.
Fuir de la prison finit par devenir un instinct de protection. Des organisations de défense des droits humains ont souvent alerté sur les conditions carcérales, que peu de choses ont changé.
La population devrait-elle avoir peur des évasions?
Pour le criminologue Lupitshi, rien ne prouve, à priori, réellement que les personnes évadées des prisons sont capables d’actes qui menacent la sécurité des communautés. Mais, avoue-t-il, parmi les prisonniers, certains sont redoutables. D’où la nécessité de rester en éveil. Sa conviction est qu’avec « pareille évasion, une société ne peut pas rester tranquille. On craindra que la criminalité puisse augmenter. Mais seule une réelle étude peut le déterminer. »
On serait parfois tenté de lancer la chasse aux évadés. Le scientifique prévient : « Aussi longtemps que les prisons congolaises ne répondront pas au standard exigé, d’autres évasions seront recensées ».
Evasions des prisons : “personne ne devrait rien y gagner”
Dans la situation normale, personne ne devrait profiter des évasions. Mais un doute, lorsque les luttes politiques peuvent inclure la violence, s’installe alors un doute. « La concomitance des faits est plus ou moins suspecte », fait remarquer l’universitaire. « Les évasions sont une mauvaise chose tant pour l’opposition que pour le pouvoir, car la population est insécurisée. Mais seule une étude peut le confirmer sur le terrain. Je ne pense pas que quelqu’un en profite. »
Une chose est sûre, les prisons congolaises ne souffrent pas seulement de peu de respect des droits humains. Elles sont fragiles, parfois parce que les services de garde sont eux-mêmes mal entretenus, y compris en parlant de leur rémunération et des conditions de travail. Tout cela peut jouer dans les évasions des détenus.
Fidèle Bwirhonde