Bakata Katanga, une création des luttes au sein de la coalition FCC-CACH ?

In Politique
Bakata Katanga, Lubumbashi

Lubumbashi a retrouvé son calme le week-end dernier. Mais l’incursion nocturne des miliciens Bakata Katanga du chef de guerre Gédéon Kyungu, en cavale depuis le premier trimestre de 2020, continue de susciter des interrogations. Notamment en ce qui concerne les effets d’un tel événement dans une ville comme Lubumbashi et pour la province. Tout donne à croire, en effet, que cet événement rentre dans une logique de coups fourrés. Contre Jacques Kyabula ?

Un coup politique, c’est sans doute l’allure qu’a prise l’insécurité dans la province du Haut-Katanga depuis pratiquement l’année 2019. Même la société civile répète, à Lubumbashi, que les vols et tueries qui écument le Haut-Katanga atteignent une dimension qui implique la responsabilité du gouvernement central. Et l’affaire Bakata Katanga l’illustre bien.

Insécurité persistante à Lubumbashi et dans la région

En 2019, le président Félix Tshisekedi lui-même avait effectué un déplacement de Lubumbashi dans le but de mettre un terme à la criminalité grandissante. Un an plus tard, les autorités provinciales continuent à se battre quasiment seules. Plusieurs fois, elles ont dénoncé un « sabotage ». Une formule, pour rester peu bavard, qui traduit plusieurs réalités rarement exprimées à haute voix.

Une de ces réalités, c’est qu’il manque de cohérence dans certaines actions qui rentrent dans le cadre de l’insécurité dans le Haut-Katanga. C’est le cas de l’activisme des miliciens May-May séparatistes « Bakata Katanga » qui veulent l’indépendance du Katanga.

Lire : La société civile de Lubumbashi à Felix Tshisekedi : la fin d’« Insécurité, impunité, corruption »

Ce mouvement s’est fortement essoufflé. Il n’y a pas de commune mesure, en effet, entre ce qui se passe en ce moment et l’activisme violent qui avait suscité le déplacement d’un demi-million de personnes dans le Nord-Katanga, entre 2013 et 2015. Avec, on s’en souvient encore, une incursion spectaculaire dans Lubumbashi, et des tentatives de prise des symboles du pouvoir comme l’aéroport de Luano, à Lubumbashi.

Depuis 2017, année au cours de laquelle le chef de la milice rendait les armes auprès de l’armée congolaise, le mouvement Bakata Katanga s’est déstructuré. Puisque son chef, Gédéon Kyungu, a choisi une lutte politique. Il avait même créé un parti Politique, MIRA. Même sa récente évasion de sa résidence surveillée a suggéré qu’il a gardé le contact avec des cellules actives dans la région. On croit d’ailleurs qu’il les a rejointes.

Vraiment les Bakata Katanga ?

L’organisation assez lacunaire des éléments que les forces de sécurité ont capturés lors de la récente incursion tend aussi à confirmer l’idée d’un mouvement essoufflé. Même s’il réussit encore à mobiliser des jeunes, parmi les plus vulnérables en milieux ruraux. Ils sont arrivés, en effet, avec quelques armes automatiques comme les AK47, des calibres 12 ainsi que des armes blanches dont des machettes et des flèches.

Lire aussi | Bakata Katanga : ce qui s’est passé samedi à Lubumbashi

Un tel armement ne saurait logiquement convaincre qu’on vienne dans une ville qui abrite le QG de commandement régional de l’armée. Même Gédéon Kyungu lui-même, pour peu qu’il comprenne ce que veut dire « faire face » à l’adversaire qui est une armée organisée, ne saurait assumer une telle témérité.

Si donc la piste d’un militantisme assumé des indépendantistes, qu’on connaît affaiblis ne tient pas la route, que se passe-t-il ? Plusieurs hypothèses restent possibles. Mais la plus plausible paraît bien celle des luttes internes au sein de l’actuelle coalition gouvernementale FCC-CACH.

Guerres sans merci, attaques contre Jacques Kyabula ?

Au sein du FCC mugissent des ambitions que rarement des acteurs politiques prennent le courage d’exprimer. Pourtant, selon nos sources, certains se livrent une guerre sans merci dans le but d’occuper des postes responsabilité. Être ministre, au niveau national ou en province, gouverneur ou bourgmestre, … plusieurs en rêvent naturellement.

Est-ce là l’entendement qu’il faut avoir de la dénonciation de « sabotage » faite par des autorités du Haut-Katanga au sujet de l’insécurité ? C’est ce que croit un membre du FCC contacté par Congo Durable. « Ils veulent montrer que le gouverneur Jacques Kyabula ne gère pas bien », pour espérer le remplacer. « Ils ont échoué avec l’insécurité dans la province. Maintenant ils essaient avec les Bakata Katanga qu’ils connaissent pourtant bien eux-mêmes », assure la même source.

Pour lui donc, l’incursion des miliciens May-May Bakata Katanga est un complot contre le gouverneur Kyabula. « Ils viennent désorganiser la province », et la stratégie mécontente ceux qui analysent la situation de cette façon.

Une affaire nationale

Au final, cette crise creuse petit à petit le coffre-fort du Congo que constitue l’ancien Katanga. Une région où si l’insécurité persiste, des centaines de sociétés privées (minières notamment), risquent de ne pas fonctionner normalement. Ce qui risquerait de priver l’Etat de précieux revenus.

Jacques Kyabula ne saurait visiblement seul résoudre une telle situation. Les autres gouverneurs de provinces de l’ancien Katanga l’ont récemment dit, lorsqu’ils dénonçaient les tensions à la douane de Kasumbalesa.

CD

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