À La Haye, plusieurs lettres tomberaient sur le bureau de la procureure générale de la Cour Pénale Internationale, Fatou Bensouda. Des lettres contre l’ex-président congolais, Joseph Kabila que beaucoup voudraient voir à la barre. Il faudrait, soutiennent ces lettres, ouvrir des enquêtes sur Kabila et certains acteurs politiques et officiers militaires de temps.
Parmi les plus emblématiques, la lettre du Partenariat Canadien pour la Justice Internationale, datant du 17 juin dernier est très évoquée. Aussi celle de Human Rights Watch introduite près de deux mois plus tard. Toutes voudraient des poursuites judiciaires contre Joseph Kabila.
Bensouda n’aurait pas assez de courage
Sont visées par des possibles enquêtes les violences postélectorales de 2006, entre autres.
Des faits qui remontent à 14 ans mais pour lesquels personne ne réunit le courage nécessaire à les aborder. Visiblement pas même la procureure générale elle-même.
Les tueries dans le centre de la RDC sous le triste phénomène Kamwina Nsapu au Kasaï sont aussi citées, en plus des violences de 2016 résultant du manque d’organisation des élections notamment présidentielles.
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Enfin, il y a les atrocités qui se commettent à l’Est de la RDC, et ce depuis des années. Et pour plusieurs organisations nationales et internationales, tout ceci a été orchestré avec l’implication de Joseph Kabila et ses proches.
Mais à la CPI, la procureure ne se presse pas. Ce serait par prudence. Mais nombreux y voient un manque de courage.
En effet, ce n’est sûrement pas facile de lancer des nouvelles poursuites contre un africain au regard de toutes les critiques contre ce qui serait un acharnement de la CPI contre l’Afrique.
La CPI peut pourtant enquêter en RDC
Toutefois, la procureure générale de la CPI ne reste pas moins offensive. Puisque quelques jours plus tôt, Bensouda a égrainé les arguments juridiques qui lui donnent le droit d’enquêter en RDC.
D’ailleurs, après le passage du coronavirus, il y aurait une mission de la CPI prévue en RDC pour d’autres exactions.
En effet, parlant de la RDC, la procureure avait rappelé que la CPI a été créée pour poursuivre et juger les personnes accusées de crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. Mais alors, est-ce le cas ou pas en RDC ?
La procureure générale de la CPI avait également précisé que l’expérience dans d’autres pays a démontré que lorsque les esprits s’égarent lors d’élections, et que les personnes n’agissent pas avec retenue, cela donne lieu à des crimes à grande échelle.
Ce qui relève de la compétence de sa cour, la CPI. En pareil cas, son bureau n’hésiterait pas à prendre des mesures conformément aux critères définis par le statut de Rome.
Mais pas de quoi faire trembler Joseph Kabila
A Kinshasa comme partout en RDC, les arguments de la procureure ne suffisent pas pour espérer arrêter Joseph Kabila. D’abord parce que la cible a encore des soutiens dans tous les rangs militaires et politiques.
Puis, parce qu’elle devra obtenir en amont la collaboration du pouvoir actuel dont Kabila est le principal partenaire. Et enfin, en vertu du principe de la souveraineté de chaque pays membre, ce n’est pas évident qu’elle s’improvise avec des enquêtes sur le territoire congolais sans y être invitée.
Mais en RDC, beaucoup ne seraient que des soutiens de façade pour Joseph Kabila. Ils seraient en attente de ces enquêtes et même de son arrestation pour qu’enfin éclate la boite de pandore.
Sauf qu’à la suite des dernières élections, Joseph Kabila a cédé le pouvoir mais il reste incontournable dans la conduite de la vie du pays.
En effet, la plateforme qu’il dirige, le FCC, a gagné aux dernières élections législatives 79% de sièges à l’Assemblée nationale.
Une position qui lui a valu de rafler la primature. Aussi, c’est le FCC qui a la majorité des sièges dans les provinces. Bref, le champ d’influence de Kabila est encore large.
Pression des ONG
Ainsi, les lettres des ONG demandant l’arrestation de Joseph Kabila ou des enquêtes sur lui pourraient n’aboutir à rien pour l’instant.
Mais dans un autre sens, elles pourraient tout simplement marquer le début d’un feuilleton judiciaire historique. En attendant, la CPI ne semble pas avoir le culot de se lancer.
Willy Mbuyu